Certains français adoptés à l’international sont à la recherche de leurs origines et ont découvert que leur adoption n’a pas toujours été un choix de leur famille biologique.
Lisez l’article concernant le trafic d’enfants au Sri Lanka et répondez aux questions de compréhension.
Par L’Obs avec AFP Publié le 25 juin 2019
Paris (AFP) – Plus de trente ans après, des Français victimes d’un vaste trafic à l’adoption au Sri Lanka, et leurs parents adoptifs, se sont lancés dans une quête difficile pour faire toute la lumière sur leurs origines.
“Beaucoup de parents éprouvent de la culpabilité ou sont encore dans le déni”, confient à l’AFP Jean-Noël et Véronique Piaser-Moyen, victimes de ce scandale révélé récemment. “Il y a trois parties victimes: les mères biologiques, les enfants, et nous les parents adoptifs. Nous avons besoin d’entendre que nous ne sommes pas coupables”.
Le couple qui a adopté un bébé – Maria – en 1985 au Sri Lanka, a découvert récemment qu’il avait participé à son insu à un vaste trafic à l’adoption internationale. Ce dernier pourrait concerner quelque 11.000 bébés volés ou vendus par différents intermédiaires à des familles occidentales, selon les enquêtes menées par plusieurs médias français et étrangers.
L’existence de ce trafic a été reconnue par le gouvernement sri-lankais en 2017.
Volés à la maternité avec la complicité de “recruteurs”, ou vendus pour quelques dizaines d’euros par des familles pauvres ou fragiles, les enfants pouvaient ensuite être regroupés dans des “fermes à bébés” avant d’être intégrés au circuit d’adoption, selon l’émission néerlandaise Zembla qui a révélé l’affaire en 2017. Les enfants étaient aussi parfois présentés devant le tribunal par des “mères actrices”.
“En suivant rigoureusement le processus prévu par les États français et sri-lankais nous ne doutions pas que tout ce que nous faisions pour cette adoption était légal”, expliquent M. et Mme Piaser-Moyen dans une lettre aux organismes de l’adoption internationale, dont l’AFP a obtenu copie.
Comment un tel trafic a-t-il pu prospérer?
Au Quai d’Orsay, on explique que les adoptions reposaient sur un “système privé”, avant la convention de La Haye de 1993 qui encadre depuis lors les adoptions à l’étranger.
Quelque 1.500 visas d’adoption ont ainsi été délivrés par les autorités françaises au Sri Lanka avant la ratification de la Convention par le pays en 1995.
Parmi les adoptions, “il y en a quelques-unes pas régulières et d’autres régulières”, reconnaît le ministère, qui souligne la responsabilité d’ “intermédiaires locaux” parfois peu scrupuleux.
– Recherche d’origine –
Mais M. et Mme Piaser-Moyen reprochent surtout aux autorités françaises la délivrance de visas d’adoption alors que, selon eux, “personne semble-t-il ne vérifiait les documents”, et notamment le certificat de naissance “faux dans sa forme et presque toujours dans son contenu”.
Un argument rejeté avec fermeté par le ministère: les familles ont déposé des demandes “en présentant des documents officiels sri-lankais” et “les autorités consulaires n’avaient aucun moyen de les remettre en question”.
Une procédure a été mise en place avec le Sri Lanka pour que les enfants adoptés en recherche de leurs origines suivent un circuit officiel.
Mais “ce circuit ne fonctionne pas”, selon M. et Mme Piaser-Moyen, qui déplorent l’absence de réponse des autorités sri-lankaises.
Ils se sont rendus sur place en novembre dernier avec leur fille, dont ils ont finalement retrouvé la mère biologique par l’intermédiaire d’une source au sein de l’ancien réseau de trafiquants. Selon leurs informations, Maria aurait été volée à la naissance, présentée devant un tribunal par une “fausse mère” avant d’être retrouvée par sa mère biologique qui l’a elle-même ensuite confiée à l’adoption.
D’autres Français adoptés, désormais âgés d’une trentaine d’années, ont également entrepris de retrouver leur famille biologique par leurs propres moyens.
Parmi eux, Céline Breysse, 36 ans, qui a récemment retrouvé sa mère biologique, a fondé un groupe Facebook d’aide à la recherche d’origines.
“Je diffuse les noms et informations des mères biologiques qui recherchent leur enfant, avec l’aide d’un contact sur place, on recueille leur ADN, et j’aide également à décrypter certains documents d’adoption”, explique-t-elle.
Son groupe rassemble aujourd’hui quelque 400 personnes de 15 pays différents.
Elle regrette que le Sri Lanka n’ait jamais mis en place la banque de données ADN et l’aide gratuite sur place promise. “La recherche d’origine est un droit. Il faut mettre en place des moyens pour l’appliquer”, affirme-t-elle.
Questions de compréhension:
"Elle regrette que le Sri Lanka n'ait jamais mis en place la banque de données ADN et l'aide gratuite sur place promise."